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Pour Maxime Laisney (LFI), il y a « manifestement » un racisme systémique dans la police


Publié le 11.07.2023


INTERVIEW/VIDÉO - Le député La France insoumise condamne « évidemment » les pillages qui ont lieu suite à la mort du jeune Nahel. Il dénonce toutefois des dysfonctionnements au sein de la police, dont un racisme « qui se traduit dans certaines pratiques policières ». Maxime Laisney se dit aussi inquiet de l’influence des certains syndicats de police « factieux » au sein même du gouvernement.

« On ne peut pas mettre tous les policiers dans le même panier », commence par expliquer Maxime Laisney. « Ce qui est sûr, c’est qu’il y a du racisme dans l’ensemble de la société, il y en a aussi dans la police et ça se traduit dans certaines pratiques policières, ça c’est sûr ». Le député prend l’exemple du jeune Nahel mais aussi d’Alhoussein Camara, jeune de 19 ans tué au mois de juin lors d’un contrôle de police. « Il avait le malheur de conduire une voiture à 4h du matin et sans doute d’être noir », affirme le député insoumis. « Il s’en allait au travail, puisqu’il venait d’obtenir un CAP. Il était très investi dans son club de foot. Je ne sais pas quel était son autre tort, peut-être de ne pas avoir été filmé au moment de son interpellation ». Selon l’élu de La France insoumise, il y a donc « manifestement » un racisme systémique au sein de la police, « puisqu’il y a des actes qui se terminent par la mort de certains de nos concitoyens qui, souvent, n’ont pas la même couleur de peau que la mienne ».

Syndicats de police : « il y a une espèce de chantage vis-à-vis du ministère de l’Intérieur et du gouvernement »

S’il est inquiet du comportement de certains agents, Maxime Laisney s’alarme de celui des syndicats de police, notamment Alliance et UNSA Police. Des organisations qui ont, selon lui, bien trop de pouvoir. « Je pense sincèrement que les syndicats de police font déjà la pluie et le beau temps dans la profession. Alliance et Unsa Police, qui ont co-signé ce communiqué qu’on pourrait qualifier de factieux, parlent des ‘nuisibles’ qu’il y aurait en France, disent qu’ils sont en guerre, qu’ils sont prêts à entrer en ‘résistance'. Ce qu’on comprend, c’est qu’il y a une espèce de chantage vis-à-vis du ministère de l’Intérieur et du gouvernement, ce n’est pas tolérable ».

Le gouvernement, quant à lui, est resté muet face à ce communiqué, unanimement condamné au sein de la Nupes. Pour quelle raison ? « Peut-être parce qu’on a peur ! » reconnaît Maxime Laisney. « Parce que les policiers sont ceux qui détiennent les armes. Et peut-être fondamentalement parce que, jusqu’ici, on a un gouvernement qui a imposé une bonne partie de sa politique grâce à la police. On a un pouvoir qui mène une politique anti-sociale, anti-populaire et même anti-écologique et qui embastille des militants avec les moyens de l’anti-terrorisme et qui a donc besoin d’une police qui lui obéit. En retour, il faut que le gouvernement lui donne ce qu’elle demande ».

« Sur Twitter, des militants d’extrême-droite ont dit qu’ils connaissaient mon adresse »

Au-delà de la police et des syndicats, c’est dans l’ensemble de la société que Maxime Laisney s’inquiète de voir l’extrême-droite monter. « Je vois qu’il y a des groupuscules d’extrême-droite qui menacent les gens sur les réseaux sociaux, qui de plus en plus, se permettent de sortir dans la rue, se baladent avec des battes de baseball, disent qu’ils vont aider le retour à l’ordre en s’occupant eux-mêmes des problèmes qu’il y a dans notre pays. Ça m’inquiète ». Une violence et des menaces dont le député Insoumis peut d’ailleurs témoigner. « Cette semaine, sur Twitter, des ‘twittos’, là aussi des militants d’extrême-droite, ont dit qu’ils connaissaient mon adresse ! Alors, j’espère que c’est faux, mais si c’est vrai, j’espère qu’ils vont la garder pour eux, parce que ça ne me paraît pas très raisonnable ».

La mort de Nahel « a révélé un sentiment de malaise dans les quartiers »

La France insoumise, et par extension la Nupes, a été sous le feu des critiques lors des émeutes. En cause, des difficultés pour le parti à condamner les violences d’une seule voix. En outre, une frasque de Jean-Luc Mélenchon qui avait refusé d’appeler au calme. « Ce que nous condamnons, ce sont les pillages, évidemment » affirme Maxime Laisney. Il rappelle toutefois qu’« il y a d’abord eu une révolte, qui a été provoquée par la mort de Nahel, d’un tir de policier. C’est ça qui a mis le feu aux poudres et qui a révélé un sentiment de malaise dans les quartiers. Parce que, malheureusement, la présence des policiers dans les quartiers, elle n’est pas toujours pour le meilleur ».

Le député pointe notamment du doigt les contrôles au faciès pour expliquer les tensions entre populations des quartiers et policiers. « On sait par exemple que les contrôles d’identité trois fois par jour sur les mêmes personnes, c’est quelque chose qui est assez documenté, ça fait partie des choses qui ont alimenté les évènements de la semaine dernière ».

« Les habitants des quartiers populaires souhaitent le retour au calme mais aussi qu’on entende le mépris et la colère »

« Vous savez, les élus de La France insoumise connaissent assez bien les habitants des quartiers populaires », explique Maxime Laisney. On les rencontre régulièrement et on n'a pas attendu les évènements de la semaine dernière pour y aller ». « Ce que j’ai entendu de leur part, c’est à la fois qu’il souhaitaient le retour au calme mais aussi qu’on entende le mépris et la colère qui s’expriment ». Le député insiste : « ce sont des gens qui se sentent complètement abandonnés et méprisés ». Il donne notamment l’exemple des logement sociaux. « Il faut voir les conditions dans lesquelles on vit dans ces logement sociaux, alors que les loyers sont beaucoup plus chers qu’on pourrait s’imaginer ».

« Ça arrive qu’on ait des désaccord avec Fabien Roussel, ça en fait un de plus »

Le secrétaire national du Parti communiste français s’est déjà fait remarquer pour ses prises de position difficilement conciliables avec celles de La France insoumise. Le 4 juillet dernier, Fabien Roussel a estimé que LFI avait « légitimé » les violences dans les quartiers. « Je me désolidarise totalement des propos de Jean-Luc Mélenchon et de certains de ses députés qui ont refusé d’appeler au calme », avait-il fustigé.

« Ça arrive qu’on ait des désaccords avec Fabien Roussel, ça en fait un de plus », dit Maxime Laisney, l’air gêné. Encore combien de désaccords LFI pourra-t-elle encore supporter ? « On verra à l’avenir si c’est un petit ou un gros désaccord, si c’est conjoncturel ou si ça s’inscrit dans le temps ». L’insoumis se veut tout de même rassurant. « Je travaille avec les députés de tous les groupes de la Nupes sur les sujets qui sont les miens, en l’occurence ce ne sont pas ceux de Fabien Roussel. Moi je n’ai pas de difficultés avec mes collègues communistes, écologistes ou socialistes sur les sujets de l’énergie sur lesquels je travaille ».

« Il n’y aura pas un kilowatt qui sera produit par le ‘nouveau’ nucléaire avant au moins 2040 à mon avis »

Sur l’énergie, justement, un débat vient de s’achever à l’Assemblée nationale autour de la relance nucléaire en France. Fidèle à son parti, Maxime Laisney est farouchement opposé à l’atome, lui préférant, à l’instar de l’Allemagne, les énergie renouvelables. Un désaccord de plus avec Fabien Roussel et la majorité des députés communistes qui craignent de voir le charbon remplacer le nucléaire au pied levé. « L’Allemagne a diminué ces dix dernières années sa production de nucléaire d’une centaine de térrawatt-heures. Même chose pour le charbon », commente Maxime Laisney. Par contre, elle a augmenté sa production d’énergies renouvelables de plus de 200 térawatt-heures. Donc la vérité de ce qu’il se passe en Allemagne, c’est qu’ils sortent et du nucléaire et des énergies fossiles ». 

Pendant ce temps, Emmanuel Macron prévoit de relancer la production nucléaire avec la création de nouveaux EPR, des centrales nucléaires, ou encore de SMR (Small modular reactor), sorte de mini centrales nucléaires. L’Allemagne, elle, prévoit d’être « complètement autonome en renouvelable à l’horizon 2038, alors que nous on n’aura toujours pas construit le premier nouveau réacteur nucléaire, si par malheur on arrive à le faire. L’EPR 2, qui est présenté comme une version simplifiée, pour l’instant, il n’y a même pas de prototype ! Quand au SMR, on est encore plus loin du compte. Donc il n’y aura pas un kilowatt qui sera produit par le ‘nouveau’ nucléaire avant au moins 2040 à mon avis ».

Son interview en vidéo

Photo : DR

 

 


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