Pierre Laurent (PCF) : « Le Conseil de défense sanitaire est une très mauvaise idée depuis le début »
Publié le 23.11.2021
INTERVIEW - Pierre Laurent, vice-président du Sénat et ancien secrétaire national du Parti communiste français, est revenu sur la cinquième vague de Covid-19 mais aussi sur la politique « raciste et xénophobe » que propose Éric Zemmour.
Invité de Raphaël Bardenat et Adrien Hardy mardi 23 novembre, Pierre Laurent s’est dit « inquiet » de la situation sanitaire. Il s’attendait à un rebond de l’épidémie, « ce n’est pas une surprise ». « La cinquième vague était à prévoir ». Mais pour lui, la France écoute « plus Emmanuel Macron et les ministres que les médecins », ce qui révolte le sénateur communiste. Pierre Laurent considère également que la pandémie doit être traitée « au niveau mondial et non national », ce qui n’est « absolument pas fait aujourd’hui ». « Il faut continuer de prendre des précautions et de se donner les moyens sanitaires et scientifiques dans la lutte contre la maladie » insiste-t-il. Pierre Laurent le dit « depuis le début », le conseil de défense sanitaire « est une très mauvaise idée ». « C’est à l’abri des regards et les débats ne sont pas publics » ajoute-il. Il préfèrerait mettre en place « un conseil scientifique et pluraliste qui prend en compte les décisions de tout le monde ». Pour lui, Emmanuel Macron « gouverne seul face à la pandémie » et cherche « en permanence à imposer une nouvelle décision ». « Ce n’est absolument pas le bon moyen de fonctionner ».
« Unir les gens et leur faire comprendre la situation », c'est aujourd'hui ce que souhaite Pierre Laurent. « Il faut prendre des mesures publiques et sanitaires, ce qui n’est toujours pas fait dans les hôpitaux ». « Tout ce qui contribue à mieux protéger la population doit être utilisé ». L’ancien secrétaire national du PCF assure qu’une « immense majorité des français souhaite être vaccinée ». « Si les scientifiques disent qu’une troisième dose est nécessaire, il faut les écouter » insiste-t-il. Alors que les médecins parlent d’une vague psychiatrique en plus de toutes celles de contamination à la Covid-19, le sénateur estime que « le gouvernement n’y prête pas attention ». Selon lui, « les moyens donnés à la santé mentale sont trop faibles ». Il renchérit, « les appels à l’aide sont lancés depuis des années dans ce secteur mais ils ne sont pas écoutés ».
« Il faut un plan d’urgence pour l’Outre-mer »
Depuis le 23 janvier 2021, la Martinique et la Guadeloupe sont le théâtre de plusieurs grèves et violences. En cause, la mise en place du pass sanitaire et du couvre feu. Pour Pierre Laurent, « la question du pass sanitaire en Outre-mer cristallise une crise beaucoup plus profonde ».« Le gouvernement méprise ces territoires » affirme le sénateur. La vie y est « chère », « il n’y a pas d’eau potable pour 30% des Guadeloupéens » et « de graves problèmes de logement ». « Des appels à l’aide sont lancés depuis des mois mais on ne s’occupe pas de la situation de ces territoires ». Le sénateur exige « un plan d’urgence pour l’Outre-mer ». Il estime que les habitants y « vivent un peu comme dans des colonies françaises » et ne « sont pas à égalité avec la France métropolitaine ». La pandémie de Covid-19 a fait « ressurgir tous les problèmes sociaux des DROM-COM » (anciennement DOM-TOM). « Tous les élus ultramarins disent qu’il n’ont pas été écoutés » s’insurge Pierre Laurent. Il faut « répondre à leurs revendications » et s’occuper de « toutes les questions qu’ils mettent sur la table ». Selon l’ancien secrétaire national du PCF, « on peut continuer à ne pas écouter ces gens-là, mais alors il ne faut pas prétendre qu’on va résoudre leurs problèmes ». Il en est persuadé, si « ces soucis sont résolus » alors « les habitants d’Outre-mer se feront vacciner ».
« La France n’est pas assez combative face aux idées de droite et d’extrême droite »
Evoquant la campagne présidentielle, Pierre Laurent confie ne pas bien voir « les différences de discours politiques à droite ». Il existe, pour lui, « une panoplie de candidats à droite qui proposent les mêmes politiques extrêmement dangereuses pour le pays ». Le vice-président du Sénat espère sincèrement que « la gauche fasse émerger d’autres solutions » même si elle n'est aujourd’hui « pas suffisamment à l’offensive ». Pierre Laurent estime qu’il y a « des troubles et du découragement à gauche, chez les élus comme chez les militants ». Il faut selon lui « réussir à bousculer la situation ». « Le paradoxe, c’est qu’on est à un moment où il faut absolument changer de trajectoire dans tous les sujets » ajoute-il. Le sénateur est convaincu qu’avec Emmanuel Macron et les autres « versions de la droite et de l’extrême-droite », la France va continuer d’avoir « les mêmes politiques ». Des politiques qu'il juge « racistes et xénophobes » lorsqu'il cite « Éric Zemmour ». « Ce sont des variations de politiques ultra-libérales ». Pour l’ancien numéro 1 du PCF, « on n’est pas assez combatif contre les idées de droite et d’extrême-droite ». « Il faut montrer aux français que le danger est beaucoup plus grand qu’on ne l’imagine ».
Pour lui, « les Français se détournent des élections car ils sont inquiets de la situation actuelle ». « Notre tâche, c’est de redonner confiance en la gauche » explique l’ancien secrétaire national du Parti communiste français. Pierre Laurent trouve « extrêmement grave » que certains français « pensent que la politique d’exclusion les protégerait ». Il faut selon lui « être unis » et « montrer qu’une politique solidaire est possible ». Le vice-président du Sénat n'a qu'un souhait : que les élus de gauche « aillent au contact des électeurs » afin de « reconstruire une conscience ».
Photo : MRG / Raphaël Bardenat