Pour Sly Johnson, le Saïan Supa Crew « s’est terminé de manière brutale et pas de la bonne manière »
Publié le 19.02.2023
INTERVIEW/VIDÉO - Le chanteur Sly Johnson, ancien membre du groupe Saïan Supa Crew, travaille sur un nouvel album. L’auteur du tube Angela a retracé son parcours sur MRG, de la création du collectif et sa carrière solo à son arrivée au Late Show d’Alain Chabat. A l'approche de la cinquantaine, il regrette également la séparation du groupe et les difficultés pour ses membres de se retrouver.
Sly Johnon grandit à Montrouge. D’abord attiré par la danse, il se destine très tôt à la scène et à une carrière artistique. « Mon père, c’est sûr qu’il avait un peu chaud quand il a vu que je me mettais à fond dans la musique, ironise le chanteur. Mais il a vu que j’étais aussi sérieux dans ce que j’étais en train d’entreprendre, quand il a vu que ça marchait, qu’il y avait de plus en plus de concerts, que les gens commençaient à lui rapporter qu’ils m’avaient vu ici et là, il est devenu l’un de mes plus grands fans ! ».
Le sourire aux lèvres, à l’idée de ses premiers pas dans le monde la musique, Sly se remémore les genres qui ont forgé son style. « Tout petit, j’écoutais ce qu’écoutait mon père, explique-t-il. Donc c’était beaucoup de jazz, beaucoup de soul, de musique afro-cubaine ». Le jeune homme se créé par la suite de nouvelles références avec « Michael Jackson, forcément ! C’était l’un des premiers albums que j’ai pu m’acheter », confie l’artiste. Également « beaucoup de pop anglaise et américaine. Et du funk par ci par là ».
Bagneux, lieu de naissance du Saïan Supa Crew
« Moi j’habitais Montrouge et je dansais, explique-t-il. Donc je me retrouvais souvent à Bagneux, où il y avait beaucoup de danseurs. La culture et le mouvement Hip-Hop y étaient beaucoup plus forts, donc je m’y suis retrouvé assez souvent ». C’est justement à Bagneux, dans le 93, lors du festival hip-hop « Les alliances urbaines » que Sly Johnson rencontre Leeroy et Specta, qui deviendront ses futurs partenaires. « À la suite de ça, on s’est retrouvé à Paris, dans le XIXe, pour enregistrer nos maquettes et faire de la musique et c’est là qu’on a rencontré Féfé, Vicelow, KLR et Sir Samuel. Très très vite, on a su qu’il fallait faire quelque chose ensemble et on a créé ce collectif, ce groupe : Saïan Supa Crew ».
Le succès d’Angela : « on s’est pris la vague de plein fouet ! »
« On a été très surpris », reconnait celui qui n’avait que 25 ans en 1999, lors de la sortie d’Angela, écoulé à plus de 300 000 exemplaires. Le collectif est alors propulsé sur le devant de la scène. Certains le comparent mêmes au Wu-Tang Clan, l’un des plus grands groupes de rap américains de tous les temps. À l’époque, « on était complètement plongés dans notre passion et notre envie de rencontrer et de fidéliser un public, explique le chanteur. Donc on était très loin de ce qui pouvait se passer en radio. Et c’est en été, en rentrant de tournée, qu’on s’est pris la vague de plein fouet ! ». Pour Sly Johnson et ses confrères, l’accès à la célébrité est brutal, mais il permet au groupe français d’atteindre un plus large public. Sly se souvient de « beaucoup de plaisir, beaucoup de bonheur. Ça a porté le groupe, notre musique, ça nous a permis de voyager énormément et d’avoir une renommée en dehors de nos frontières ».
Presque vingt-cinq ans plus tard, le titre est toujours un classique du hip-hop français. Il est d’ailleurs repris en 2020 par le rappeur Hatik pour un morceau qui devient lui aussi un tube instantanément. « Je suis très heureux de cela, commente le rappeur. Ça veut dire que le Saïan Supa Crew fait partie de l’histoire de la musique en France. On peut en être fier, je le suis en tout cas. Je n’aurais pas cru qu’une telle chose aurait pu m’arriver à mes débuts ».
« Le groupe s’est séparé de manière très précoce »
Malgré un succès certain, le groupe finit par se séparer en 2007, huit ans seulement après sa création. Une séparation pour laquelle Sly Johnson ne cache pas son amertume. « C’est dur de s’en rendre compte parce qu’on est pris dans un tourbillon, tente-t'il d’expliquer. Les choses nous tombent dessus les unes après les autres et on n'a pas forcément le recul nécessaire pour se poser, analyser et prendre toute la mesure de ce qui nous arrive. Je pense que c’est pour cela, en finalité, que le groupe s’est séparé de manière très précoce selon moi. Je pense qu’on a manqué de recul et de temps pour se poser ». Le rappeur évoque « beaucoup de tristesse » mais aussi « un sentiment d’injustice ». « Ça s’est terminé de manière brutale et pas de la bonne manière je trouve, pour l’histoire qu’on a eu tous ensemble ».
Des retrouvailles manquées pour les vingt ans du titre Angela
Bien que certains membres soient toujours en contact, Sly Johnson reconnaît que « ça fait très très très longtemps qu’on ne s’est pas revu tous ensemble ». « C’est quelque chose dont j’avais envie, il y a de cela deux ou trois ans, explique-t-il. C’était en 2019 pour l’anniversaire de la sortie du premier album : KLR, sorti en 1999. J’avais envie qu’on se retrouve et qu’on puisse célébrer cette histoire et cet album qui nous a apporté tant. Malheureusement, ça n’a pas pu se faire ». Avec des retrouvailles si difficiles à organiser entre les six anciens membres, Sly Johnson n’est donc pas très optimiste quant à un potentiel retour du groupe sur le devant de la scène. Ce n’est d’ailleurs pas quelque chose qu’il souhaiterait particulièrement, nous confie-t-il. « Certains disent que l’espoir fait vivre mais vu qu’on n'a pas réussi à se retrouver, il m’est très difficile de l’imaginer. Actuellement, ce n'est pas une envie que j’ai ».
Sur Le Late Show : « on ne dit pas non à Alain Chabat ! »
Ces derniers temps, les Français ont pu apercevoir Sly à la télévision, au sein du groupe qui accompagne Alain Chabat lors de son talk show à l’américaine sur TF1. « C’est grâce à mon ami Martin Gamet, qu’on voit à la batterie dans ce groupe, explique le rappeur. On avait collaboré en accompagnant l’artiste française Camille. C’est comme ça que j'ai rencontré et que je suis devenu ami avec Martin. Il a ensuite été missionné par Mathieu Chedid, qui est pote avec Alain Chabat, pour monter le futur groupe du Late Show. Et il a fait appel à moi, tout simplement ». Un appel qui, on le devine, n’a pas eu besoin de s’éterniser. « J’ai dis oui sans hésiter ! Je me voyais pas refuser de retrouver Martin à nouveau et puis on ne dit pas non à Alain Chabat ! »
« Je suis en train de travailler sur un nouvel album »
Depuis un an, Sly Johnson a retrouvé la scène, a sorti un album et s’est également marié. Pour autant les projets continuent de foisonner. Le rappeur et beat-boxeur sera d’ailleurs en tournée dans la région parisienne au court de l’année 2023. Mieux, un nouveau projet est officiellement sur les rails ! « Je suis en train de travailler sur un nouvel album. Juste avant l’interview, j’étais en train de faire du son, donc je suis vraiment en plein dedans ! ». Nouveau disque en préparation donc, qui sortira vraisemblablement en début d’année 2024. Quand on lui demande un petit extrait de ce qu’il prépare, Sly éclate de rire. « Ah non, ça je peux pas ! Par contre, vous aurez le droit à ma toute première interview quand le disque sortira, promis juré ! ».
Rendez-vous pris pour l’année prochaine ! En attendant Sly Johnson sera bientôt en tournée dans toute l’Île-de-France. Il sera notamment à Achères, dans les Yvelines, le 18 mars.
Son interview en vidéo
Photo : DR